ÉDITIONS PLEIN CHANT

AJOUTS

Juin 2021







T R O I S    E N I G M E S

extraites de


Nouveau Recueil d'Enigmes
Nouvelle Edition corrigée et augmentée

Paris, au Palais, Th. Le Gras, 1721.





  

  Page 12.

   Je tiens comme les Dieux registre des pensées,
  
Je fixe la parole, et je lui donne un corps :

   Du temple d’Apollon, j’ouvre tous les trésors,
   Mon Art met sous vos yeux les histoires passées.

  Mes forces par le tems  jamais ne sont usées
  Et mes charmes puissants ressuscitent les morts :
  Par moi du noir Cocyte ils repassent les bords,
  Et viennent triompher des Parques abusées.

  J’entretiens les plus sourds sans parole et sans bruit,
  Je passe à ma couleur pour fille de la nuit,
  Je mets dans un grand jour les plus secrets mysteres.

  J’instruis cet Univers de l’un à l’autre bout,
  Et quand on me consulte afin de sçavoir tout,
  Ainsi qu’un Enchanteur j’use de caracteres.




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Page 87.

   Effet inanimé d’une cause vivante,
   Je ramene les morts à la clarté du jour ;
   Et de tant de Heros l’ingenieux retour
   Emprunte de mon art une gloire éclatante.

   Je suis le favori de la troupe sçavante,
   J’explique les effets du sort et de l’amour,
   Par moi plus de mille ans sont l’espace d’un jour,
   Celui qui m’a produit ou se cache ou se vante.

   Je parle à l’Univers sans proferer un mot,
   J’amuse le sçavant, et j’amuse le sot ;
   Ma solide beauté vient de ma doctrine.

   L’ignorance me fuit tâchant de me blâmer,
   Je porte bien souvent une trompeuse mine,
   Et l’on doit me connoître avant que de m’aimer.

 



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  Page 281.

      A l’abri d’une peau légere
      Je tiens cent Héros renfermez,
  Et par moi seulement leurs faits si renommez,
      Sont à couvert de la poussière ;
 Cependant sous l’éclat des ornements divers,
      Dont ma figure est revêtue,
      Je cache avec soin à la vue
 Un corps qui bien souvent est tout farci de vers.
 Jugez de mon employ, quoique fort ignorante,
      En un espace assez petit,
      Je renferme beaucoup d’esprit ;
      Mais qui de me voir se contente,
 Sans regarder jamais ce que j’ai dans le cœur,
      Est sans doute un pauvre Docteur.

 



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