ÉDITIONS PLEIN CHANT

(LES AMIS DE PLEIN CHANT)

Septembre 2022






    





Quatre dictionnaires insolites



En principe, les dictionnaires se définissent par leur utilité, donner le sens des mots, mais en tout temps paraissaient, rarement il est vrai,  des dictionnaires plus ou moins originaux. Au dix-septième siècle on eut Le Grand Dictionnaire Historique des Precieuses, par le sieur de Sommaize (Paris, 1661), au dix-huitième, le Dictionnaire typographique, historique et critique des Livres rares, singuliers, estimés et recherchés en tous genres, par J.B.L. Osmont, libraire à Paris (Paris, chez Lacombe, libraire, Quai de Conti, (1767). En 1856 le libraire et éditeur Pierre Jannet donnait une nouvelle édition du Dictionnaire des Précieuses en deux volumes et en 2002 Jan dau Melhau publiait Mon Dictionnaire ou Mais qu’est-ce que je fous dans ce merdier ? (Chez l’auteur).
    Voici donc ci-dessous quatre dictionnaires choisis pour leur caractère insolite : Dictionnaire comique, satyrique, critique, burlesque, libre et proverbial (1718), Le Joujou mystérieux (1876), Le Dictionaire (sic) des Halles, Dictionnaire infernal.
Pour rester dans le genre hors-normes, on a remplacé les traditionnels culs-de-lampe par de réelles images glanées çà et là, chacune d'entre elles ayant un rapport — plus ou moins précis, on le reconnaît— avec le texte.




    
 



I.

 

DICTIONNAIRE COMIQUE, SATYRIQUE, CRITIQUE, BURLESQUE,
LIBRE ET PROVERBIAL

Avec une explication trés-fidele de toutes les manieres de parler Burlesques, Comiques, Libres, Satyriques, Critiques & Proverbiales, 

LE TOUT

Pour faciliter aux Etrangers, & aux François mêmes, l’intelligence de toutes sortes de Livres. 

Par Philibert-Joseph Le Roux (Amsterdam, Zacharie Chastelain, 1750).

 


Ce Dictionnaire comique… parut pour la première fois en 1718. L'auteur, dont on ne connaît pas la date de naissance, mourut à Bruxelles vers 1735.

On le cite pour son titre alléchant, mais à la lecture on est déçu par le texte où les mots satyrique, burlesque, libre sont pris en un sens faible. Il est vrai que l’auteur avait  prévenu le lecteur dans son Avertissement : les dictionnaires, « On les regarde ordinairement comme l’ouvrage du pédantisme, & la ressource des ignorans. On les achete, on les étale par mode et par ostentation, & on dédaigne d’en faire usage par crainte et par présomption. […] [tandis que dans le Dictionnaire comique on y voit…] ce que le comique a de plus fin & de plus risible ; ce que le burlesque a de plus bouffon, & de plus plaisant ; ce que le satyrique a de plus piquant & de plus enjoué. »




 II.

 

LE JOUJOU MYSTÉRIEUX

 

par Jules Gay

[à lire dans] Liste de livres à titres singuliers et bizarres (suite),

texte recueilli  dans Analectes du bibliophile
(Bruxelles, chez Jean Gay, Paris, P. Daffis, troisième livraison, 1876, p. 69).

 

 

Le titre, classique dans sa forme avec les trois premiers mots, renvoie en réalité à un livre imaginaire. Le lecteur en jugera après avoir lu le titre complet : Le Joujou mystérieux. Dictionnaire aristocratique, démocratique et mystigorieux de musique vocale et instrumentale, dans lequel on trouve des digressions sur l’hippiatrique, la gastronomie et la philosophie hermétique, publié en lanternois, par Krisostauphe Clédriol, docteur ferré, marqué et patenté, professeur de castagnettes dans les conservatoires ; traduit par Ydâlôhtüstiphèjâldempêub, râcleur de boyaux. Prix marqué, 100 fr ; prix net, à la volonté du marchand. Partout et nulle part, l’an 100803000600 (Paris, 1836), in-18 de 252 pages. — Le titre de cette facétie a la forme d’un verre à pied.






III.

LE DICTIONAIRE DES HALLES,

OU EXTRAIT DU DICTIONAIRE DE l’ACADEMIE FRANÇOISE

(Bruxelles, François Foppens) M. DC. XCVI (1696)


 

Attribué — à tort ? — à Antoine Furetière (1619-1688).

On lit dans l’Avertissement : « Comme l’Académie a pris de la Cour et du Palais certaines façons de parler, qui sont propres des gens du Barreau, elle a emprunté sagement des Halles tous les Proverbes qui y sont en usage, et elle a consulté apparemment les Harangeres qui excellent dans ce langage ; il y a mesme lieu de croire qu’elle a consulté aussi les Gadoüars [vidangeurs] sur certaines locutions, qui ne sont gueres usitées que parmy eux : par exemple, s’embrener dans une affaire ; il a chié dans ma malle. »

L’ouvrage sera cité par Nodier dans Description raisonnée d’une jolie collection de livres (Paris, Techener, 1844), page 84, où Dictionaire est devenu Dictionnaire. Il précise que « le Dictionnaire des Halles n’a point d’auteur proprement dit, puisque c’est une compilation qui n’a donné que la peine de copier. Cependant M. Barbier l’attribue à un nommé Artaud, et la plupart des rédacteurs de catalogues à Furetière. C’est une erreur grave, en ce qui concerne celui-ci, Furetière étant mort en 1688. »

 





IV
.

 

DICTIONNAIRE

 

INFERNAL,

ou

BIBLIOTHÈQUE UNIVERSELLE,

 

Sur les Êtres, les Personnages, les Livres, les Faits et les Choses qui tiennent aux apparitions,
à la magie, au commerce de l’enfer,
aux divinations,
 aux sciences secrètes, aux grimoires,
aux prodiges,
aux erreurs et aux préjugés,
aux traditions et aux  contes populaires
aux superstitions diverses,
et généralement

à toutes les croyances merveilleuses, surprenantes, mystérieuses et surnaturelles.

 

(Titre de l’édition de 1826, Paris, Librairie universelle de P. Mongie aîné)

 

L’auteur, Jacques Collin de Plancy (1794-1881), était né Jacques Collin tout court ; quant à son Dictionnaire infernal, il parut pour la première fois en 1818, suivi par d’autres éditions remaniées par l’auteur après sa conversion en 1841 à la religion catholique. Dans la sixième édition (Paris, Henri Plon, imprimeur-éditeur, 1863), on lit dans la préface, page VIII :

 

« […] Ce livre donc reproduit les aspects les plus étranges des évolutions de l’esprit humain ; il expose tout ce qui concerne les esprits, lutins, fées, génies, démons, spectres et fantômes, les sorciers et leurs maléfices, les prestiges des charmeurs, la nomenclature et les fonctions des démons et des magiciens, les traditions superstitieuses, les récits de faits surnaturels, les contes populaires. Il ouvre les cent portes fantastiques de l’avenir, par la définition claire des divinations, depuis la chiromancie des bohémiens jusqu’à l’art de prédire  par le marc de café ou le jeu de cartes. L’astrologie, l’alchimie, la cabale, la phrénologie, le magnétisme, ont leur place en des notices qui résument par quelques pages de longs et lourds in-folio. Enfin, le spiritisme, les tables parlantes, et les progrès du magnétisme se trouvent dans ces pages. Depuis quarante-cinq ans, l’auteur n’a cessé d’agrandir ce patient travail, en poursuivant ses recherches dans des milliers de volumes. Avant lui, personne n’avait songé à réunir en un seul corps d’ouvrage toutes les variétés que rassemble Le Dictionnaire infernal, et nul ne peut nier l’utilité de cette entreprise.
Les superstitions et les erreurs ont toujours pour fondement une vérité obscurcie, altérée ou trahie ; les éclairer, c’est les combattre […]

Par-dessus ces avantages, on a voulu satisfaire le goût de notre époque, qui exige des lectures piquantes, et, les sujets aidant, on a pu lui offrir très-fréquemment ces excentricités, ces singularités, cet imprévu  et ces émotions dont il est si avide.

L’auteur de cette sixième édition, en la revoyant avec grand soin, l’a augmentée de 800 articles ; et l’éditeur l’a illustrée de 550 gravures, parmi lesquelles 72 portraits de démons, dessinés, d’après les documents de Wierus et des plus curieux démonographes. »

 

 

 

F I N.



 










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