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Albéric Second, au premier tome de La
Comédie parisienne (Paris, 1857, t. I, pp.
133-134) jugeait la statistique de son temps.
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Je
ne crois pas qu'il y ait une science aussi navrante
que la statistique.
Étant données
mille créatures humaines, la statistique nous
enseigne combien il existe
D'hommes
bossus,
De
banqueroutiers frauduleux,
De femmes
coquettes,
D'avocats
bavards,
D'enfants
naturels,
D'auteurs sifflés,
D'épiciers
voleurs,
D'escompteurs
condamnés pour usure,
De boursiers
ruinés,
De
sous-préfets appelés à d'autres fonctions,
De
compositeurs sans inspiration,
De comédiens
sans talent,
Et de ténors
sans voix.
Observez qu'un faiseur de statistiques ne
s'amusera jamais à dénombrer les choses bonnes et
vertueuses, les faits honorables, les actions
méritoires.
Toute son attention, tous ses soins, tous ses
calculs sont absorbés par les faits douloureux, par
les actions punissables, par les choses
affligeantes.
Les faiseurs de statistique ressemblent aux
petits mendiants du grand peintre Murillo.
Leur existence s'écoule à chercher, d'un
doigt agile et d'un œil de lynx, la vermine de
l'humanité.
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