|  | Clément
                  Pansaers vu par Philippe Soupault & Pascal Pia | 
| PHILIPPE SOUPAULT Il a trouvé
                  dans l'atmosphère de Dada à la fois une satisfaction
                  et en même temps une déception. Parce que
                  effectivement le mouvement Dada, à ce moment, au
                  moment où Pansaers l'a connu, n'était plus seulement une
                  révolte, c'était une sorte d'entreprise de scandale.
                  Et Pansaers a tout de suite vu ce qu'il y avait si
                  vous voulez, de spectaculaire et ça l'a un peu déçu.  
 
 
  * 
 PASCAL
                  PIA 
 
 Pansaers
était
                  un personnage des plus curieux, en perpétuelle
                  effervescence et dont la grande
                  admiration, à 1'époque où je l’ai connu, était Joyce.
                  C'était certainement un des tout premiers lecteurs de
                  Joyce. Il connaissait Joyce. Il avait lu une partie d'Ulysse,
                  je pense, en manuscrit, chez Sylvia Beach. Il en avait
                  lu dans Little Review. Il faisait une grande,
                  grande propagande pour Ulysse, je le vois encore dans un
                  bar du boulevard des Capucines, cherchant
                  à placer à des ivrognes anglo‑saxons des bulletins de
                  souscription pour Ulysse. 
  
 
 
 Alors, pour sa littérature personnelle, à 1'époque où je l’ai connu, il avait des quantités, des quantités de manuscrits à publier. Il n'avait publié que quelques plaquettes dadaïstes, le Pan‑Pan au Cul du Nu Nègre, Bar Nicanor, l’Apologie de la paresse. Il en avait encore d'autres à publier. Et puis alors, il rêvait aussi de publier je ne sais quel travail très, très, important sur les papes. Il y avait deux ou trois papes, en général d'ailleurs des anti‑papes, qui l'intéressaient particulièrement et sur lesquels il aurait voulu faire quelque chose. Il faisait aussi de la peinture. Il cherchait à en vendre et à ma connaissance, pendant les six ou sept mois que je l'ai vu, dans les années 21‑22, je ne crois pas qu'il ait réussi à vendre un seul tableau. Je sais alors qu'il avait pendant l'occupation allemande publié une revue qui s'appelait Résurrection. Il m'avait promis de me la procurer mais je n'en ai jamais vu un seul numéro. je me rappelle qu'il paraissait à ce moment-là en Belgique une revue plus ou moins communisante qui s’appelait Haro, n’est-ce pas. Eh bien, il était, tout en étant lui-même fort révolutionnaire, enfin, aussi nihiliste qu’on peut l’être, il était très hostile à Haro parce que ces gens-là prétendaient instituer un ordre nouveau. Lui n’était pas du tout partisan d’un ordre nouveau, il fallait tout foutre en l’air et puis on verrait bien après. | 
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|  |  La gouache ci-dessus
                    (Plein Chant n° 39-40, p. 123), par Clément
                    Pansaers, fut réalisée pour le manuscrit original de
                    Point d'orgue
                      programmatique… Le portrait photographique est bien entendu celui de Pansaers, vers 1920. Les propos de Philippe Soupault et Pascal Pia (p. 70-72) ont été tenus lors de l' émission Contre l’oubli : un dadaïste, Clément Pansaers (RTB, 16 juin 1968). |